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L’Essaillon
« Entre la Tourre et lou Crapoun,
I a moun païs, qu’ei Sederoun »
Alfred Bonnefoy-Debaïs

Etudier, préserver et faire connaître le Patrimoine Historique, Naturel et Culturel de Séderon et de sa Région

Lou Trepoun 51
La vie quotidienne à Eygalayes depuis 1925 (2)
(suite)
Article mis en ligne le 13 décembre 2014
dernière modification le 18 août 2019

par PASCAL Réné

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Commencée avec le bulletin précédent [1], la publication des souvenirs de René Pascal se termine avec les paragraphes qui suivent.

LES CONFLITS MONDIAUX 1914-1918 et 1939-1945
Pendant la Ie Guerre Mondiale, Eygalayes a payé un lourd tribut au conflit - tous les noms gravés sur la pierre du Monument aux Morts sont là pour rappeler le sacrifice de leur vie et faire en sorte que nous ne les oublions pas.

Pour le conflit de 1939-1945, il n’y a pas eu de morts parmi les soldats du village, engagés ou appelés ; par contre il y a eu 8 prisonniers de guerre, à savoir :

  • Fernand Taxil (dont le père était mort en 1914-18)
  • Fernand Jouve (oncle de Suzanne)
  • Joseph Girard (dit joseph Placide, de Près des Bruns)
  • Marceau Coutton, de la Saulce
  • son frère Lucien Coutton
  • René Pascal, le village, évadé en 1941
  • son frère Maurice Pascal, libéré en 1943 pour raisons de santé
  • Louis Bonnet (oncle de Gérard) interné en Suisse, pays neutre, libéré en 1941

J’ai été un des premiers prisonniers de guerre à revenir au pays. Toutes les familles ayant des prisonniers voulaient savoir comment s’étaient passés les premiers mois de captivité.
Le 22 février 1944, une tragédie liée directement au conflit a été l’attaque au petit matin du camp de maquisards d’Izon, suite à la dénonciation aux autorités d’occupation par 2 faux maquisards infiltrés au camp depuis peu.
De nombreux récits faits par deux rescapés et des témoins font que je ne m’attarderai pas sur le déroulement de ces tragiques évènements qui ont plongé le village et les villages voisins dans une grande tristesse. Le Cimetière National, très bien entretenu par le Ministère des Anciens Combattants est devenu un lieu de recueillement tous les ans pour l’Ascension. Il y a encore quelques résistants de cette époque mais leur nombre s’amenuise tous les ans.

LES GRANDS TRAVAUX

1932-1934 : construction du pont en béton armé sur la Méouge, pour relier le hameau de La Saulce à la route Séderon-Laragne.

Ce pont a été réalisé par l’entreprise A. Rolland de Ballons La Calandre. Ces travaux importants pour la Commune ont amélioré la vie des habitants du hameau composé de quatre fermes et qui devaient franchir la Méouge à gué pour se rendre dans leurs champs ou dans les villages voisins. Pendant les crues, seuls les piétons pouvaient passer en empruntant une passerelle rudimentaire située face à la ferme Jouve de Préverdiant. Les écoliers étaient souvent contraints de faire l’école buissonnière, ce qui peut être ne déplaisait pas à tous.
photo Camille Jullien

Alimentation du village en eau potable

La réalisation du premier projet d’alimentation du village en eau potable, compte tenu des études et des subventions, a débuté en 1938. Interrompue par la guerre, seul le bassin a pu être construit au-dessus de la ferme Mathieu. C’est l’entreprise A. Rolland qui avait été adjudicataire des travaux, et l’approvisionnement des canalisations en fonte avait pu être réalisé.
En 1950 le Conseil Municipal a pris la décision d’effectuer des recherches pour le captage d’une source au lieu-dit « Vinson ». C’est en 1952 que les travaux ont pu être entrepris et menés à bien par une entreprise de Gap. Le débit de cette source n’étant pas assez important, seules les habitations du village ont pu être alimentées. Avant cela il fallait remplir les arrosoirs ou les seaux à l’une des deux fontaines du village qui existent toujours.
Avec la réhabilitation d’anciennes maisons en résidences secondaires, il s’est avéré rapidement que l’alimentation en eau potable devenait insuffisante. En 1985-1986 un nouveau projet a vu le jour, et celui de 1938 a été repris, c’est-à-dire le captage de « Font-Chaude » la source Lombard (l’eau est très fraîche malgré le nom). Un nouveau réservoir de 100 m3 a été construit près de la source « Vinson ». Quelques fermes de plus ont pu être alimentées.
En 1992 une extension du réseau de distribution a permis d’alimenter les quartiers du « Pré des Bruns », du « Plan », de « La Borie » et de quelques maisons se trouvant à proximité du passage des canalisations.
En 2006, devant de nouveaux risques de pénurie et après de longues interventions administratives auprès de la DDA, de l’agrément de l’eau et l’achat de la source, un nouveau captage a été réalisé près de la stèle des Fusillés.

Electrification [2]

En 1937-38 d’importants travaux ont été effectués afin de fournir l’électricité au village et aux fermes environnantes. Malgré les difficultés dues au relief, ils ont été exécutés assez rapidement. Dans les zones escarpées les poteaux en ciment ont été amenés à pied d’œuvre par des mulets.

Ils ont nécessité une main d’œuvre importante ce qui a provoqué un regain d’activité pour les commerces des villages, ces travaux ayant touché beaucoup de communes de la région.
Cette réalisation, avec l’alimentation en eau potable, a été celle qui fut la plus appréciée pour le confort et les facilités de la vie de tous les jours.

En 1940, reconstruction du pont sur le Riançon reliant le village au quartier du Brusquet, travaux réalisés par l’entreprise A. Rolland

LES ÉCOLES

Il y a eu deux écoles au village.
L’une située près du cimetière a été fermée vers 1929 - 1930 et est devenue une résidence secondaire habitée actuellement par la famille Gadina. Plusieurs enseignants s’y sont succédé, dont Mme Marie Delhomme, décédée en 1929, grand-mère d’Henri et de Marie-Lucienne. Mme Thirion a enseigné à Eygalayes, puis à Ballons. J’y suis allé un an ou deux.
L’autre était située à l’entrée nord du village, côté lavoir. Fermée en 1972, elle avait pendant longtemps abrité les services de la Mairie dans l’appartement réservé aux enseignants. Elle fut démolie en 1984 suite aux accords avec la DDE qui désirait faciliter l’accès vers le col St jean et aussi assurer une liaison plus facile avec la nationale 75. L’indemnité versée en contrepartie avait servi à la construction de la nouvelle Mairie, entre 1978 et 1981.
Un autre instituteur, M. Ferdinand Pascal, né à Montauban-sur-Ouvèze (hameau de Saumane) en 1854, a enseigné à Eygalayes mais je n’ai pas de date précise. C’était le frère de mon père et est décédé à Lyon en 1944.

RATTACHEMENT de la MANCHE de BALLONS à EYGALAYES en 1938

Un évènement que l’on pourrait qualifier d’historique a eu lieu le 30 octobre 1938.
A la suite de plusieurs pourparlers entre M. Gibelin, maire de Ballons, son conseil municipal et celui d’Eygalayes représenté par Fernand Girard, il avait été convenu que la Manche de Ballons (Dauphiné) ferait partie intégrante de la commune d’Eygalayes (Provence). Ces deux parties ne sont séparées que par le Riançon.
Tout cela après intervention des géomètres afin de déterminer de façon précise la part de territoire revenant à Eygalayes (et qui n’était pas importante). Par contre Eygalayes avait gagné douze habitants - compte tenu de la population de l’époque, cet apport était appréciable.
Les enfants de la Manche étant déjà scolarisés à Eygalayes, rien ne changea de ce côté-là.

ÉPILOGUE

Je viens de vous décrire le plus fidèlement possible la vie à Eygalayes à partir de 1925. Ce récit comporte certainement des oublis, peut-être des erreurs de dates et de personnes : j’ai fait cela du mieux que j’ai pu, ce n’est pas facile de rassembler 83 ans de souvenirs...
Je vous demande à vous les jeunes et à ceux qui sont attachés à ce village de conserver le mieux que vous le pourrez ce petit coin de Provence en souvenir de ceux qui n’y sont plus, pour le plaisir de ceux qui ont décidé d’y vivre et pour ceux qui sont de passage afin qu’ils en gardent un bon souvenir.

René PASCAL
juin 2009

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