L’Essaillon
« Entre la Tourre et lou Crapoun,
I a moun païs, qu’ei Sederoun »
Alfred Bonnefoy-Debaïs

Etudier, préserver et faire connaître le Patrimoine Historique, Naturel et Culturel de Séderon et de sa Région

Quand nos ancêtres allaient chez le juge ou le notaire
Article mis en ligne le 1er décembre 2017
dernière modification le 30 décembre 2019

par DETHÈS Romain

Nous continuons d’explorer la vie des habitants de Séderon et du canton en publiant des transcriptions d’actes de notaires ou de juges de paix [1]

Vente des moulins
Dans cet acte notarié [2], nous découvrons les modalités et contenu de la vente des moulins de Séderon…

Vente prix 9800 fr à M. Amic ? Marius Gleize des Omergues, par M. Pierre Antoine Augustin Jullien, de Sederon des moulins de Sederon.

à Séderon le 18 Mars 1846

L’an 1846 et le 18 Mars pardevant nous Charles Antoine Reynaud Lacroze notaire Royal à la résidence de Sederon, chef lieu de canton, arrondissement de Nyons, département de la Drôme, et en présence des témoins à la fin nommés avec nous soussignés,

a comparu Monsieur Pierre Antoine Augustin Jullien propriétaire vivant de ses revenus demeurant et domicilié à Séderon, lequel a vendu sous toutes les garanties de droit et de fait, à Monsieur Amic ? Marius Gleize notaire Royal, demeurant et domicilié aux Omergues, commune du Canton de Noyers, Basses Alpes, ici présent acceptant et acquérant,

les moulins à grains et à huile que M. Jullien possède sur le territoire de Séderon, dont un est situé lieu-dit « le plus haut Moulin » et consiste en logement pour le propriétaire, moulin pour le froment, moulin pour le gros grain, gruaire, pression d’huile, écurie, grenier à foin, décharges, jardin et petite terre labourable, tout contigu, dont l’ensemble confine, au levant, le grand chemin, au midi Joseph François Constantin et François Dethes, au couchant, la rivière et au nord, l’épouse de François Lombard, ravin entre deux  ;

et l’autre, lieu-dit Saint Pierre, appelé « le plus bas Moulin » qui consiste en un Moulin pour le froment, en basse-cour et terre labourable, tout contigu, dont l’ensemble confine au nord, François Pascal dit Bataille et de partout ailleurs des chemins  ; 1° les immeubles sont vendus de toutes leurs contenances, avec leurs servitudes actives et passives, notamment avec les servitudes actives dont sont grevées la terre sise à Séderon, lieu-dit « le plus bas plan », que M. Jullien a donné à dame Adeline Jullien sa fille, épouse de M. Payan, de Séderon, dans leur contrat de Mariage qu’ a reçu M. Bernard notaire à Mévouillon en 1840. 2° la terre que possède actuellement Antoine Michel dit Ramée de Séderon, au lieu dit les Biaux, par acte en nos minutes  ; sur lesquelles deux terres l’on ne peut point construire de Moulins ni autres usines allant par le moyen de l’eau ni y laisser passer de canaux pour pareilles usines  ; de plus M. Jullien s’interdit le droit de construire des usines allant par le moyen de l’eau et de laisser passer des canaux pour les usines sur une terre qu’il possède à Séderon, lieu-dit les Isles, qu’il a acquis de Antoine Plaindoux, dit Clamençon de Séderon, par acte en nos minutes.

Les immeubles sont de plus vendus avec tous les outils et effets mobiliers actuellement existant à l’usage des usines, avec leurs canaux, prises d’eau, haies, le tout sans aucune exception ni réserve, moyennant la somme de 9800 francs seulement, vu le grand nombre de réparations dont les usines ont besoin dans le moment actuel, vu les concurrences qui se sont établies dans le voisinage et celles qu’on est à la veille d’établir encore  ; de laquelle somme de 9800 francs M. Gleize en a de suite mis et compté sur table la somme de 3800 francs qui ont été pris, vérifiés et emboursés, au vu de nous notaire et témoins, par M. Jullien qui donne quittance d’autant  ; et quant aux 6000 francs restants, M. Gleize promet et s’oblige de les payer à M. Jullien. Savoir, 3000 francs d’aujourd’hui en deux ans et 3000 d’aujourd’hui en quatre ans, avec intérêt du tout au cinq pour cent par an, sans retenue, qui courront à dater du premier avril 1846, qui est le jour d’entrée en possession et jouissance desdits moulins et dépendances  ; en conséquence M. Jullien recevra le trimestre qui écherra le premier avril 1846 desdits immeubles et ce de Joseph Jourdan fermier actuel des dits biens, de conformité au Bail à ferme intervenu entre M. Jullien et ledit Jourdan, devant M. Boin, notaire à Saint-Vincent, canton dudit Noyer, le 29 septembre 1841, lequel Bail à ferme M. Gleize s’oblige de maintenir ou de s’arranger avec le fermier ainsi qu’il avisera  ; M. Jullien ne devant plus rien avoir à faire avec ledit fermier après le payement du trimestre qui écherra le 1ᵉʳ avril 1846.

Jullien déclare tenir les immeubles comme les ayant acquis des mineurs de feu Jean-Baptiste Dethes par acte de licitation reçu ledit M. ??? et nous reprenant M. Morenas jadis notaire audit Mévouillon, le 12 mai 1835, et le dit Jean-Baptiste Dethes en était propriétaire d’après l’acte d’acquisition qu’il en fit des sieur Anglés de Saint-Vincent et Armand de Sisteron, ainsi qu’il conste de l’acte reçu par nous notaire, le 1ᵉʳ Janvier 1827, qui fait mention des titres en vertu desquels lesdits Anglés et Armand les possédaient.

M. Jullien vend lesdits immeubles francs et libres de toutes hypothèques généralement quelconques, légales, judiciaires et conventionnelles, si ce n’est de la légale de dame Rose Marthe Adelaïde Morenas son épouse, et nous reprenant je dis Morard son épouse, que l’acquéreur faira purger à ses dépens, s’il le juge à propos  ; étant convenu que tous les frais du présent acte et ceux auxquels il donnera lieu doivent être à la charge de l’acquéreur et M. Jullien se réserve de clause expresse son privilège jusques a entière libération de la part de l’acquéreur.

Ainsi le tout a été convenu et accepté, sous toutes les obligations et soumissions en pareil cas requises ; dont acte fait à Séderon, en l’étude et lu aux parties, le tout en présence des sieurs Paul André Reynaud maitre cordonnier et Joseph Bonnefoy, batier, tous les deux demeurants et domiciliés à Séderon, témoins requis à ce rappelés qui ont signé avec nous notaire et les parties, après du tout lecture faite par nous notaire aux parties en présence desdits témoins.

Jullien Gleize Reynaud Bonnefoy Reynaud-Lacroze
Pour la petite histoire : Grâce aux actes notariés retrouvés, on parvient à identifier quelques propriétaires des moulins de Séderon. Ainsi, au début du 19ᵉ siècle, ils appartenaient à Michel Richaud de Salignac. Il les vend ensuite à Michel Anglés de St-Vincent et Jean Joseph Armand de Sisteron. Ces derniers cèdent les 2 moulins pour 14000 francs à Jean-Baptiste Dethès dit «  de Liauron  » en 1827. Suite au décès de ce dernier, les moulins sont achetés en 1835 par Pierre Antoine Augustin Jullien de Séderon qui les revend ici en 1846 pour 9800 francs «  vu le grand nombre de réparations dont les usines ont besoin dans le moment actuel, vu les concurrences qui se sont établies dans le voisinage et celles qu’on est à la veille d’établir encore  » à Amic Marius Gleize notaire Royal, demeurant et domicilié aux Omergues. On recense ici 5 propriétaires en moins d’un demi-siècle : signe d’une activité peut-être peu rentable…
Romain Dethès